SUSPENSION OU ANNULATION DES LOYERS COMMERCIAUX ET CORONAVIRUS ( OU COVID-19)

 

Depuis les restrictions de déplacements et le confinement instauré par décret du gouvernement à la suite de l’épidémie de Coronavirus ou Covid-19, nombre sont les entreprises qui cherchent par tous moyens à préserver leur trésorerie. La suspension des charges fiscales et sociales pourrait ne pas suffire, le chômage technique est souvent un moyen supplémentaire, mais que dire des loyers commerciaux qui courent alors que l’entreprise ou le commerce est fermé et tous les employés en confinement parfois sans possibilité de faire appel au télétravail.

Devant cette situation inédite qui donnera lieu après le retour à la normale à une jurisprudence certainement abondante, ou à des ordonnances gouvernementales,  une réflexion juridique prophylactique s’impose afin de ne pas créer de situation insoluble en sortie de crise.

I . LA DÉCLARATION D’ URGENCE SANITAIRE ET LES DÉCRETS DE CONFINEMENT PERMETTENT DE SUSPENDRE L’OBLIGATION DE PAYER LES LOYERS COMMERCIAUX

La combinaison de l’ensemble des décrets du mois de mars 2019 et des textes applicables permet de suspendre les loyers :

Les textes applicables sont pour rappel les suivants :

L’article 1218 du Code civil dispose que « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur. Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »

Pour tout contrat signé avant le 29 février 2020 cet article a vocation à s’appliquer à la situation des loyers v/ Coronavirus Covid-19.

A titre subsidiaire et si la force majeure ne pouvait pas être invoquée on peut avoir recours à l’article suivant :

L’article 1195 du Code civil dispose que « Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l’exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n’avait pas accepté d’en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation.
En cas de refus ou d’échec de la renégociation, les parties peuvent convenir de la résolution du contrat, à la date et aux conditions qu’elles déterminent, ou demander d’un commun accord au juge de procéder à son adaptation. A défaut d’accord dans un délai raisonnable, le juge peut, à la demande d’une partie, réviser le contrat ou y mettre fin, à la date et aux conditions qu’il fixe. »
Cet article permet de renégocier les termes du bail en raison d’un changement de circonstances imprévisible rendant le paiement du loyer excessivement onéreux pendant la période de fermeture.
Il parait logique de démontrer l’imprévisibilité du changement de circonstances au moment de la conclusion du contrat de bail commercial.

II. MESURE PREVENTIVE : PREVENIR LE BAILLEUR DE LA SUSPENSION TEMPORAIRE DES LOYERS

Une mesure préventive semble s’imposer : Prévenir le bailleur de la suspension temporaire du paiement des loyers en justifiant de l’impossibilité de faire un chiffre d’affaire suffisant, notamment en cas d’impossibilité de télétravail ou en cas de fermeture de l’établissement.

A défaut, les suspensions de paiement de loyers liés au Coronavirus pourraient apparaître comme opportunistes et non fondées sur la situation de force majeure ou d’imprévisibilité liée au confinement.

Cette notification au bailleur doit être prouvée et donc faite en recommandée avec AR ou en email ave plusieurs destinataires ou email avec avis de réception.

III. MESURES CURATIVES

Mais certains bailleurs pourraient ne pas l’entendre et exploiter cette situation pour tenter d’obtenir la rupture du bail commercial
En cas de commandement de payer faisant courir le délai de 30 jours en vue de l’acquisition de la clause résolutoire du bail, ce qui justifie d’examiner les cas de contentieux possibles et d’imaginer d’ores et déjà les mesures curatives.

En premier lieu, dès réception du commandement de payer, il est recommandé de procéder à une opposition à commandement par voie d’huissier ou si les huissiers sont indisponibles pour délivrer l’acte d’opposition en raison du confinement et du Coronavirus, de le faire par voie recommandée avec AR

En second lieu, il existe un arsenal à la disposition du locataire commercial en réelle difficulté, constitué de quatre moyens pré contentieux ou contentieux, qui seront probablement largement utilisés, dès la reprise des activités des juridictions après la sortie du confinement Covid-19

3 .1. L’opposition à commandement devra être effectuée dans les 30 jours et rappeler (i) les termes du bail, (ii) les termes de la notification préalable au bailleur et (iii) justifier de la force majeure ou de l’imprévisibilité rendant impossible LE MAINTIEN DES FACTEURS DE COMMERCIALITÉ , c’est à dire l’impossibilité ou la difficulté de télétravail.

3 .2. L’assignation en nullité du commandement, qui devra elle aussi être diligentée rapidement et démontrer les éléments juridiques de nature à rendre le commandement non conforme en raison des articles cités du code civiles de nature à suspendre l’obligation de payer le loyer du locataire vis-à-vis du bailleur.

3.3. L’assignation en référé-délai. Cette assignation devant le président du tribunal de grande instance du lieu où se trouve le local en motivant l’urgence ou le trouble manifestement illicite au visa des articles 808 et 809 du Code Procédure Civile, a pour objet de solliciter des délais de paiement après la sortie de période de confinement Coronavirus. Le juge des référés dispose de pouvoirs liés à l’urgence ou au trouble résultant de la perte de l’achalandage, et pourra accorder 12 à 24 mois de délai en fonction de la situation à condition bien sur que le locataire reprenne le paiement des loyers courants.

3.4. L’assignation devant le juge de l’exécution ( ou ‘JEX’) . Cette assignation devant le ‘JEX’ qui dépend du tribunal de grande instance visera en particulier l’application de l’article 1195 du Code civil en invoquant un changement de circonstances imprévisible, le Coronavirus et ses conséquences sur l’exploitation du bail commercial, qui, non envisagés lors de la conclusion du contrat de bail rend l’exécution excessivement onéreuse pour le locataire.

Il faut donc anticiper de nombreux contentieux de ce genre, et nos magistrats, souvent compétents et perspicaces, auront la charge de distinguer les cas réellement motivés des cas opportunistes, ce qui permettra d’élaborer une jurisprudence basée sur la confiance entre bailleurs et locataires, et un échéancier assez long pour permettre au locataire d’apurer sa dette liée au Covid-19, tout en préservant sa trésorerie afin de reprendre une activité normale après la crise.

De son côté, le bailleur devra surement établir qu’il a ou qu’il n’a pas lui-même suspendu ses échéances de remboursement auprès de la banque si un emprunt bancaire est en cours, et les contentieux bailleurs et banques ne manqueront pas de suivre de près ceux entre locataires et bailleurs.

IV. L’ANNULATION DES LOYERS

Il est également possible pour les magasins fermés de solliciter l’annulation pure et simple des loyers  commerciaux comme semble l’avoir demandé les cinq fédérations nationales de commerçants

Une tellle demande ne peut être portée que devant le juge du fond sur la base de l’inexécution de délivrance, certes involontaire, de l’achalandage ou la commercialité, liée à la fermeture du magasin, comme ce fût le cas durant la crise des gilets jaunes dans certains quartiers parisiens.

Cette demande se heurtera à une résistance farouche des bailleurs mais méritera sans aucun doute un débat juridique complexe, où tous les intérêts devront être pris en compte, et au-delà, la mise en cause de l’assurance du bailleur qui ne tentera pas de son coté d’invoquer une clause d’exclusion .

Pour l’ensemble de ces questions, , et dès lors que tous les cas ne pourront être traités par les juridictions déjà débordées,  il est également possible que le gouvernement soit appelé à légiférer par ordonnances dans le cadre de l’urgence,  comme cela a été rendu possible par le vote parlementaire du 18 mars.

 

Le Cabinet BB&A, fort de son expérience en matière de baux commerciaux, et ouvert en télétravail durant la période de confinement, reste à votre disposition pour toute précision que vous pourriez souhaiter.

contact humain très chaleureux, toujours à l'écoute de son client, très réactif aux demandes, prend en compte l'avis du client. Très sérieux dans l'étude des dossiers = efficacité

Jacques Rosilio

Excellent cabinet, très professionnel. Avocat expert en son art, merci pour les parties d'échecs. Vive recommandation, aussi bien à titre personnel que professionnel.

Nathan Laufer

Cabinet très très professionnel, Mr Bensussan et ses collaborateurs excellent dans leur travail, toujours disponible, réactive et donneurs de bons conseils.

Traf Traf

Un cabinet faisant preuve d'une humanité rare ainsi que d'un professionnalisme exceptionnel. Lors de mes visites, l'approche ne se limitait pas au traitement basique des dossiers mais à une réelle stratégie

Pierre Barre

Nous contacter

« * » indique les champs nécessaires

Name*